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  • Octave T.

Les tensions entre l'UE et la Biélorussie


Auparavant assimilé à un espace dénué de vie, le no man’s land maintenu à la frontière polonaise est aujourd’hui traversé par des milliers de migrants en provenance du Proche-Orient. Zone de combat consensuelle, elle se fait ici le réceptacle d’une nouvelle forme de conflit : la guerre moderne hybride. Ces derniers mois, le gouvernement biélorusse a ouvert des voies aériennes avec la Syrie, l’Irak ou bien encore l’Afghanistan pour contourner l’espace aérien européen. Cet espace lui est en effet interdit de survol depuis une décision de l’UE datant de juin dernier. Cette dernière avait estimé que le président Biélorusse Alexandre Loukachenko était allé trop loin en détournant un avion transportant à son bord deux opposants au régime pour les arrêter et les envoyer en prison. Dans les faits, l’affrètement par charter entier de migrants jusqu’aux portes de l’Europe semble davantage s’apparenter à une manœuvre belligène du gouvernement de Minsk. Cette initiative fait suite aux sanctions, entre autres économiques, mises en place par Bruxelles depuis les dernières élections du pays.


Ce sont les élections du 9 août 2020 qui ont réellement tisonné les relations entre la Biélorussie et l'Union Européenne. Loukachenko, au pouvoir depuis 1994 et candidat à un sixième mandat, est officiellement réélu avec 80,08 % des suffrages face à la candidate d’opposition Svetlana Tikhanovskaïa, qui remplaçait son mari emprisonné Sergueï Tikhanovski. L’opposition dénonce une fraude massive, d’importantes manifestations s’organisent le soir même du scrutin, un climat de chaos s’installe dans le pays. Cette contestation sera lourdement sanctionnée et se soldera in fine par l’investiture d’Alexandre Loukachenko le 23 septembre. Condamnées par l’UE, ces élections et leur caractère frauduleux ont eu pour conséquence une progressive escalade des mesures restrictives à l’encontre de la Biélorussie.


Le terme de conflit hybride est utilisé par le Premier Ministre polonais pour expliquer le passage des sanctions économiques et commerciales européennes à des représailles de type migratoire par la Biélorussie. En effet, il y a plusieurs mois, le président biélorusse Alexandre Loukachenko avait prévenu de son intention d’utiliser les personnes souhaitant fuir leur pays pour créer de toute pièce une crise migratoire avec l’Union Européenne.


Cette volonté de provoquer une crise est visible au travers de la promesse que les autorités biélorusses ont faites aux futurs réfugiés irakiens, syriens, libanais ou encore afghans : en échange de quelques dizaines de milliers d’euros, un premier vol les amènerait jusqu’à Minsk avant d’effectuer par la suite un voyage vers la frontière polonaise que les migrants voient comme leur porte d’entrée vers l’Europe. De ce fait, Loukachenko a, au cours de l’été, créé une nouvelle route migratoire avec pour hub son propre pays et ainsi augmenté de manière conséquente le nombre de liaisons assurées par la compagnie nationale biélorusse Belavia entre Minsk et le Proche-Orient.


Trajet des migrants, du Proche et Moyen-Orient vers la Pologne


Au travers de ce jeu dangereux et en prenant ces milliers de personnes en otage, Alexandre Loukachenko espère faire plier l’Union Européenne et la pousser à suspendre les sanctions prises contre son pays. En effet, c'est en méprisant toutes les règles morales et en exploitant la misère et la détresse de ces femmes et de ces hommes que Loukachenko les envoie vers un autre enfer : celui de la forêt de Bialowieza à la frontière polonaise.

A cette tentative de déstabilisation de la part du président biélorusse, le gouvernement polonais a répondu fermement, peut-être de manière disproportionnée, en déployant près de 10 000 hommes et des chars contre les quelques milliers de migrants amassés à la frontière.


Au-delà de ce bras de fer entre la Biélorussie et la Pologne se trouve également un conflit au niveau supra-étatique avec la volonté de Minsk de s’opposer à la politique extérieure de l’Union Européenne et cela avec, derrière elle, un nouvel allié : la Russie de Vladimir Poutine. En effet on peut noter que derrière la Biélorussie, le président russe est présent et tire les ficelles de ce conflit, démontrant encore l’immensité de son pouvoir de nuisance auprès de l’Union Européenne. La Russie a nié toute implication mais les déclarations du ministre des affaires étrangères, Sergueï Lavrov, ne laissent pas de place au doute lorsqu’il propose à Bruxelles de payer la Biélorussie pour qu’elle garde les migrants, procédé déjà en vigueur avec la Turquie. On note ainsi l’ensemble des enjeux diplomatiques qui sont en cause et qui composent, avec les aspects économiques et migratoires, le concept d’hybridité du conflit.


La construction de l’expression « crise migratoire » mettrait en avant une position d’acteurs que l’on attribuait à tort aux migrants, alors même que ceux-ci sont, en réalité, les premières victimes du système mis en place par les présidents Poutine et Loukachenko pour rappeler à l’Union européenne leur capacité d’opposition à toute tentative de représailles ou de sanctions.



Sources :


Parti politique européen Identity and democracy : https://www.idgroup.eu/news

Parti politique renew europe : https://www.reneweuropegroup.eu/news



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