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  • Paolina D.

Silenciation, c°2018-111


Depuis 2018, la circulaire n°2018-111 oblige les établissements scolaires à fournir une éducation à la sexualité, dès l’école primaire.

Je suis à Notre-Dame “Les Oiseaux” depuis mes six ans, soit depuis 2010.


Je me pose la question suivante: est-ce que l’établissement accorde suffisamment de place à l’éducation sexuelle et affective ou ne la néglige-t-elle pas ?

Les réseaux sociaux prennent de plus en plus de place dans nos vies, et avec, les relations virtuelles connaissent une expansion importante. L’accès à Internet est beaucoup plus facile, la pornographie devient une norme dans les relations.


L’établissement doit nous transmettre d’autres schémas que ceux auxquels nous avons accès, celui du porno . Une femme soumise, un homme dominant et pas de consentement. Le problème, ce n’est pas le porno en soi. C’est l’isolement des jeunes face à cette industrie qui reproduit les codes sociétaux.


Quand j’apprends qu’un élève de cinquième fait circuler des images pornographiques dans sa classe, je m’interroge. Pourquoi fait-il ça ? En a-t-il parlé avec ses parents ? Ses parents sont-ils ouverts à la discussion ? Il peut être difficile d’aborder le sujet mais c’est pourtant indispensable.

Qui répond à ses questions ?


On peut comprendre que l’information ne lui a pas été donnée, et la pornographie a été la seule solution pour répondre à des doutes ou des questions.

Pas sûre que ce soit le meilleur moyen pour un garçon de 12 ans d’aborder la sexualité sainement. Que fait-on face à ces questions qui se multiplient ?



Dans L’archipel français, Jérôme Fourquet nous apprend que les pratiques sexuelles ont bien changé depuis 1992, il explique cette variation par la diffusion massive du porno, “des jeunes générations, dont la sexualité est fortement influencée par cet univers.” P.61

La sexualité questionne; on se pose des questions, on en parle à mi-voix. Et c’est normal. En revanche, ce qui ne l’est pas, c’est que jamais on ne nous ait parlé de consentement, de plaisir, de lubrifiant ou qu’on n’ait pas répondu à nos questions. Il est évidemment primordial d’aborder la sexualité d’un point de vue purement pratique avec les contraceptions, les protections contre les IST, mais la sexualité ne se résume pas seulement à un contraceptif ou à un système biologique.



Un rapport du bureau européen régional de l’OMS a publié en 2020 un guide intitulé Standards pour l’éducation sexuelle en Europe. Il se pose en guide pour tous les pays européens qui mettent en place une éducation sexuelle. Le préambule résume en deux phrases pourquoi l’éducation à la sexualité est mal abordée dans notre établissement : “Cette approche essentiellement négative et axée sur des problèmes est facilement critiquable. Une éducation sexuelle qui met l’accent sur les problèmes et les risques n’est pas en phase avec la curiosité, les intérêts, les besoins et l’expérience des enfants et des adolescents, et n’aura donc pas les effets visés sur leur comportement. Ce constat conduit à la demande d’une approche plus positive, qui soit non seulement plus efficace, mais aussi plus réaliste.” (p.10 du guide)


L’école devrait appliquer cette circulaire. Ce ne sont que trois heures par an. Mais trois heures qui peuvent changer le rapport à la sexualité d’adolescents, parfois perdus. La sexualité n’est pas et ne doit pas être taboue. Elle fait partie de la vie. Mais avant tout, elle reste une partie indissociable de l’adolescence, période de changements.


On se retrouve dans un corps d’adulte, que l’on doit apprivoiser. Dans un corps qui ressent du désir, de l’attirance. Et lorsqu’on a douze ou treize ans, il peut être compliqué de comprendre. L’étude du système biologique ne suffit pas.

Il n’y a qu’à aller sur Instagram, sur des comptes comme Je m’en bats le clito, Ce n’est que du sang, Lecul_nu qui grâce à des publications brisent des tabous ou répondent à des questions. Leur travail est formidable et ces comptes permettent de comprendre. Néanmoins, je ne crois pas que ce soit le rôle d’activistes sur Instagram de faire notre éducation à la sexualité. Ni à des séries comme Sex Education.


Nous sommes arrivés à un point où les ados n’osent pas poser leurs questions et vont chercher l’information sur Netflix, des sites pornos ou Instagram.


Une seconde problématique se pose; le rapport fille/garçon qui évolue vers un rapport homme/femme. Cette évolution est marquée par le rapport de séduction que l’on peut entretenir avec l’autre. La séduction est une première partie qui peut parfois finir par se concrétiser via la sexualité. La question essentielle ici, est celle du consentement.

Je suis obligée de parler de l’éducation sexuelle en évoquant les multiples agressions sexuelles dont j’ai entendu parler. Un lycée qui veut nous préparer au monde du supérieur ne devrait-il pas aborder aussi cette question ? Le supérieur en ce moment, c’est #Scienceporcs. Des dizaines de dénonciations, en masse, des étudiantes qui parlent et accusent.

L’établissement ne devrait-il pas briser cette loi du silence ? Les histoires dont on ne parle pas à voix haute, ne devraient-elles pas trouver une réponse adaptée ?

Quand une amie me confie que, lors de la dernière soirée, un mec a essayé de la violer, que suis-je supposée lui dire ? J’aimerais dire que je n’en connais qu’une. Malheureusement, toutes les filles savent. En terminale, en première.


Ces histoires se répètent chaque année, les personnes n’osent pas en parler à leurs parents, ni même à un adulte. En France, neuf femmes sur dix déclarent avoir subi au moins une fois une pression pour avoir un rapport sexuel. Et 88% au moins deux fois.

Ce résultat est effrayant. Cela signifie que le consentement de 90% des femmes n’a pas été respecté au moins une fois.

Mais pourtant, si quelqu’un vous propose du café, et que vous refusez, on ne vous forcera pas à en boire !

Il serait temps d’utiliser ces trois heures par an pour sensibiliser à ces questions.



Notre-Dame les Oiseaux, école formatrice de leaders respectueux et intègres. Ça sonne particulièrement bien à l’oreille non ?


Pour ce faire, je propose de mettre en place une enquête, auprès des élèves; qu’attendent-ils de ces heures ? Quelles sont leurs questions ? Je propose également de travailler en collaboration avec les parents d’élèves, et pourquoi pas avec une association. Faire intervenir une tierce personne, neutre, peut parfois être bénéfique. Cela permettrait d’être plus à l’aise qu’avec un professeur ou ses parents.


Abordons la sexualité à l'école. Cessons de créer un tabou qui fait des milliers de victimes chaque année. Pour rappel, chaque année 94 000 femmes sont victimes de viols en France. Éduquons, et rendons le monde meilleur.











L’archipel français, Jérôme Fourquet, éditions Le Seuil


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